Permettez-moi de vous dire mon émotion de m’exprimer dans le cadre de l’émission des Amitiés huguenotes internationales pour vous parler du livre « Annette Monod, l’ange du Vel d’Hiv » écrit par Frédéric Anquetil et publié aux éditions Ampélos.
Tout d’abord, parce que le père d’Annette Monod, le pasteur André Monod, a consacré plus de trente années de sa vie aux Amitiés protestantes françaises à l’étranger.
Ensuite parce qu’Annette Monod était une cousine de ma grand-mère que nous rencontrions chaque année lors des réunions de famille organisées au moment de Noël. C’était une vieille dame discrète, assez effacée qui parlait peu, comme ces personnes qui ont beaucoup vécu.
Annette Monod a été rendue célèbre à travers le film La Rafle. Elle a consacré toute sa vie aux prisonniers, en tentant d’apporter, autant qu’elle le pouvait humanité dans ce froid univers carcéral.
Assistante sociale de formation, elle a côtoyé la misère des familles ouvrières des années 1930.
Son engagement aux côtés des plus démunis va prendre un nouveau tournant en intervenant avec la Croix Rouge dans les camps d’internement de Pithiviers et Beaune la Rolande où sont envoyés ce que l’on qualifiait à l’époque « d’indésirables », des familles juives essentiellement, destinées à être déportées.
Elle va, autant qu’elle le peut, établir des liens, entre les internés et leurs familles, transportant courriers, objets de valeur. Elle cherche à rendre plus humaines les conditions de détention, permettant aux juifs de cuisiner casher. A chaque fois qu’elle le peut, elle tente de les faire libérer en utilisant ses relations et les possibilités offertes par la règlementation.
Elle se porte volontaire lors de la rafle du Vel d’hiv puis à Drancy. Là, elle n’hésite pas à se faire aider dans son action, et pour soutenir les internés, dans son secrétariat. Elle s’adjoint François Lyon-Caen, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation. Même après sa déportation, Annette continuera d’entretenir des liens étroits avec la famille Lyon-Caen.
Elle agit aussi, avec ses moyens dans la Résistance : elle transporte des faux papiers, cachant des enfants juifs puis les acheminant vers des réseaux surs.
← Elle sera présente lors du retour des déportés à l’Hôtel Lutétia à Paris, désespérée de constater que si peu sont revenus des camps.
Après la guerre, Annette devient assistante sociale des prisons, à la prison centrale des femmes de Haguenau, puis en région parisienne. Elle assiste tour à tour, des collaborateurs, les prisonniers du FLN de la guerre d’Algérie, les membres de l’OAS et des objecteurs de conscience. A aucun moment, elle ne porte de jugement de valeur sur le passé de ces hommes qui les a conduit en prison. A la prison de Fresnes, elle visitait les condamnés à mort qui attendaient leur exécution.
En 1950, elle rencontre et épouse Pierre Leiris, ancien résistant, chrétien de gauche engagé, musicien, intellectuel … et surtout visiteur de prison. Les détenus de la prison de Poissy leur offriront une Bible avec la dédicace : « Ils se sont connus et aimés en prison ! ».
Opposée à la peine de mort et pacifiste, ses engagements vont se poursuivre dans le cadre de l’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) et en se rapprochant des mouvements Quakers.
Cette longue vie s’achève en 2001.
par Laure Ginesty-Vermeire
(Culture protestante, chronique mensuelle des Amitiés huguenotes internationales, diffusée sur France Culture, à 8 h 55, le 7 octobre 2018).