Le Musée du Protestantisme dauphinois, au Poët-Laval, dans la Drôme, s’est intéressé, cette année, au pasteur Pierre SIMOND, un des fondateurs de la colonie huguenote du Cap, en Afrique du Sud.
Pierre Simond est né en 1651 à Nyons, en Dauphiné, à 30 km du Poët-Laval. Après des études à l’Académie de Die, il fut nommé pasteur à La Paillette-Montjoux, un petit village près de Dieulefit, puis dans les Hautes-Alpes. A la révocation de l’Edit de Nantes, il dut fuir la France pour les Pays-Bas. C’est là qu’il fut engagé pour prendre la tête, comme pasteur, d’un groupe de 150 huguenots français, volontaires pour peupler le comptoir de la Compagnie des Indes Orientales, au Cap de Bonne-Espérance.
Pierre Simond et sa femme embarquèrent donc, le 22 avril 1688, sur le « Zuid Beverland », avec vingt-cinq huguenots. Après quatre mois d’une difficile et périlleuse traversée, ils arrivèrent dans la Baie du Cap. Hélas, le premier canot débarquant les immigrants chavira et tous se noyèrent. Dans un autre canot, Simond et sa femme purent débarquer et s’installer à Stellenbosch, dans ce « coin des Français », maintenant bien connu. Simond y bâtit sa maison, qu’il baptisa « Béthléem ». Naturellement, cette petite communauté huguenote souhaitait continuer à pratiquer sa langue et à célébrer ses cultes en français. Ce n’était pas le point de vue du gouverneur hollandais, Simon Van der Steel, qui voulait en faire de bons et solides bataves. D’où un conflit assez violent entre le gouverneur et le pasteur Simond, porte-parole de sa communauté. Finalement, le gouverneur céda et autorisa le culte en français. Mais il obtint, après 14 ans de présence, que Simond et sa famille soient rapatriés au Pays-Bas.
Pendant son séjour à Stellenbosch, Pierre Simond avait composé une version en vers des psaumes de David, qu’il avait intitulé « les Veilles _Africaines ». A son retour en Hollande, il tenta en vain de faire accepter ce psautier par le synode wallon, mais put finalement le faire publier en 1704. Puis, on a perdu la trace de Simond et de son psautier. Cependant, on a retrouvé une édition de ce psautier, en 1997, à la bibliothèque nationale de Saint-Pétersbourg, puis, en 2003, un exemplaire d’une autre édition, à la bibliothèque ducale de Wolfenbüttel, près de Brunswick, en Allemagne.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Le frère de Pierre Simond, David Simond, alla s’installer en Angleterre et recueillit la famille du pasteur, après le décès de celui-ci.
_ Le fils de Pierre, Peter Simond, fit fortune dans le commerce avec les Antilles et réussit à marier ses deux filles à des lords anglais, le 11e Lord Saint John de Bletso, et Sir John Trevelyan, 4e baronnet du titre. Ainsi, un des descendants directs du pasteur dauphinois Pierre Simond est aujourd’hui un membre de l’aristocratie britannique.
C’est cette saga d’une famille huguenote d’origine dauphinoise que le Musée du Protestantisme dauphinois a voulu rappeler dans le cadre de l’exposition qui est organisée cette année au Poët-Laval et qui porte sur « Chant et musique dans les Eglises de la Réforme ».
19 panneaux traitent de la musique protestante dans l’espace francophone, des origines à la Révolution française. Y sont rapportés les raisons du lien très fort qui unit le Protestantisme et la musique, ainsi que l’apport de la Réforme à la musique religieuse, à travers les deux genres musicaux que sont le Psaume huguenot et le choral luthérien.
Des psautiers, des recueils de cantiques et des instruments anciens sont également présentés. Mais l’originalité de cette exposition est qu’elle est « musicalisée ». Pour chaque panneau a été sélectionné un extrait d’une œuvre musicale que le visiteur pourra écouter, au moyen d’un lecteur de CD portatif, tout en découvrant le texte des panneaux. Un CD a été spécialement et bénévolement enregistré pour l’exposition par une chorale protestante du Gard.
L’exposition « Musique et chant dans les Eglises de la Réforme » est ouverte au Musée du Protestantisme dauphinois, 26160, le Vieux Village, le Poët-Laval (Drôme), jusqu’au 30 septembre.Tous renseignements peuvent être obtenus au 04 75 46 46 33 et sur le site internet du Musée : www.museeduprotestantismedauphinois.org
(Emission du Comité Protestant des Amitiés Françaises à l’Etranger, diffusée sur France-Culture à 8h25, le dimanche 5 juin 2005)
par Philippe Faure
Lettre N°35
Summary : PIERRE SIMOND
by Philippe FAURE
The Protestant Museum in the Dauphiné at Poet Laval in the Drôme, is holding a special exhibition this year about “Hymns et music in reformed churches “. It recalls Pierre Simond, one of the founders of the Huguenot colony on the Cape, in South Africa. At the revocation of the Edict of Nantes, Simond, a native of the Dauphiné, became the pastor chosen to accompany the 150 French Huguenots who volunteered to help establish a colony in the Cape of Good Hope for the East India Company. They settled in Stellenbosch, where there were already French people. There was soon trouble with the Dutch Governor about celebrating services in French, but Simond was successful in obtaining permission to do so until he and his family returned to Holland 14 years later. While in South Africa, he wrote a version of the Psalms in verse, called “Les Veilles africaines” (African Vigil), which was published in 1704. Pierre Simond’s brother, David, settled in England and took in his family on his death. One of his sons, Peter Simond, made his fortune in the West Indies and his two daughters married into the English aristocracy. That’s a long way to come from the Dauphiné!